" Les forêts des Ardennes sont impénétrables…"

  • La surprise stratégique n'existe pratiquement jamais. En fait il faut toujours parler d'aveuglement stratégique, car on ne veut pas croire ce que l'on sait. ".

1932 :

  • Le général Weygand vice-président du Conseil supérieur de la Guerre, demande général Walch " d'étudier la bataille défensive sur une partie de la position de couverture qui incombe au Détachement d'armées des Ardennes (D.A.A), particulièrement dans le cas où celle-ci aurait été enfoncée par une attaque brusquée dans la région à l'est de Longuyon ".

1933/34 :

  • Mémoire concernant un avant-projet d'exercice pour l'hiver 1933-1934 de l'état-major du général Weygand : " Les conditions seraient entièrement différentes si la Belgique travaillée diplomatiquement, minée peut-être par la propagande, convenablement orientée de certains partis, cédait après un semblant de résistance. La ligne de couverture emportée, après un simulacre d'attaque, à J+1, les Allemands trouveraient eux le champ libre. La manœuvre automobile pourrait dès lors se développer, les amenant à J+2 sur le premier objectif, à J+3 sur la coupure Chiers - Meuse. La bataille s'engagerait dès lors à J+4 entre 11 DI allemandes complètes et les échelons "A" de nos forces, réduites du nord au sud à la 3e DC, la brigade de spahis, la 1ère brigade sénégalaise et le corps de cavalerie. Dans un délai de 48 heures les forces françaises seraient bien rejointes par leurs échelons "b" et en outre par 3 nouvelles DI, mais, d'autre part, la masse d'attaque recevrait de son côté 9 DI nouvelles. Notre résistance serait alors, il ne faut pas se le dissimuler, gravement compromise ".
  • Critique de l'exercice de l'exercice hiver 1933/34 dans les Ardennes : " Le couloir du Luxembourg, non défendu, sans destructions, menaçant à courte portée la gauche de nos régions fortifiées et nos rocades, c'est là la direction initialement dangereuse, en face d'une attaque brusquée dans laquelle l'Allemagne mettra certainement en jeu des moyens mécaniques et motorisés supérieurs à ceux donnés au parti bleu pour l'exercice".

Maréchal Pétain, devant la commission de l'armée du Sénat, le 7 mars 1934 :

  • " Les forêts des Ardennes sont impénétrables si on y fait des aménagements spéciaux. Par conséquent nous considérons cela comme une zone de destruction……….. ce front n'a pas de profondeur, l'ennemi ne pourra pas s'y engager. S'il s'y engage, on le repincera à la sortie des forêts. Donc ce secteur n'est pas dangereux ".

1937 :

  • En mars 1937 le colonel Bourguignon effectue, travail d'état-major normal, une reconnaissance dans les Ardennes. Devenu général, Bourguignon commande toujours les chars de la 2e armée en 1940.
  • Son mémoire commence par un rappel, " Dans des conditions optimales, une nuit pourrait suffire à l'exécution de ce mouvement. D'excellentes routes d'État, et autres, qui ont, sauf pour la largeur, valeur d'autostrades, existent au Luxembourg et en Belgique. Elles aboutissent à la frontière en direction de Montmédy, Carignan, Sedan. À noter spécialement, dans la région de la Semoy deux rocades magnifiques. En somme, bonnes et nombreuses voies d'accès : terrains d'approche partout favorables, terrains d'attaque favorables ou possibles sur tout le front ".

1938 :

  • En 1938, le général Prételat décide d'organiser avec son état-major un exercice de cadres avec comme thème " la percée allemande dans les Ardennes ".
  • Conclusions du général Prételat à la suite de l'exercice de 1938 : " Sur notre front, les Allemands ont intérêt à tenter une attaque brusquée. Celle-ci sera payante, en effet, si elle réussit à rompre notre système fortifié dans la période où nos unités de forteresse sont réduites à leurs moyens, sans possibilité de renforcement par des Grandes Unités de campagne. La supériorité en artillerie et en chars doit leur permettre de réaliser, à coup sûr, en quelques heures, la rupture de la position. Dans l'exercice, la bretelle Chiers-Meuse, trop rapprochée de la ligne principale, n'a pu être occupée à temps et n'a pas servi au rétablissement de la défense. Il faut échelonner largement les bretelles et les deuxièmes positions, et, si possible, les couvrir par des destructions. Il serait très désirable d'avoir une division blindée en temps de paix dans la 2e région susceptible d'intervenir immédiatement au bénéfice de la IIe Armée. "
  • Conclusion : " L'éventualité d'une attaque ennemie par la Belgique reste donc très possible. Il est utile d'envisager l'hypothèse de l'attaque brusquée, qui représente pour nous le danger maximum, afin d'étudier la parade ".
  • Réponse du général Gamelin au général Prételat : " Dans le cas particulier de l'exercice, il est certain que la part faite aux Allemands a été aussi belle que possible. L'offensive allemande ne s'étendant pas au Nord de la Meuse, le commandant en chef aurait sans doute mis à la disposition de la IIe Armée, la 12e D.I. motorisée, qui dispose des moyens nécessaires ".

Pourquoi alors le défaite de juin 1940 ?

  • Du point de vue tactique, l'armée française n'a pas tenu compte des conséquences qu'avait la motorisation sur la vitesse des opérations. Les destructions massives n'ont pas été faites dans les Ardennes, ce point reste à éclaircir.
  • Du point de vue stratégique l'armée gagnante fut celle ou les querelles entre les généraux furent moins nombreuses ou mieux maîtrisées, (en faisant surtout référence au conflit entre les généraux Gamelin et Prételat).



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