Kobenbusch : Une récupération avortée


En 1984, nous explorions pour la première fois l'ouvrage du Kobenbusch. La caserne était encore très propre et comportait nombre de peintures murales, plus belles les unes que les autres. Le bloc d'artillerie était vide, mais la tourelle de 75 R 32, similaire à celles du Schoenenbourg, possédait encore ses bouches à feu.

Le fort avait été récemment acheté par Electricité de France, et fut, par conséquent le premier gros ouvrage à avoir été aliéné au profit d'une organisation non militaire. La raison de cette vente était la prochaine construction de la centrale nucléaire de Cattenom. Celle-ci sera dotée d'un vaste plan d'eau qui servira de déversoir au système de refroidissement.

Ce plan d'eau sera aménagé dans une dépression, à l'arrière du Kobenbusch, ou débouchait justement l'égout principal du fort. Par conséquent il était prévu qu'une grande partie de l'ouvrage serait inondée, du fait de la montée des eaux par l'égout, au moment de la mise en eau du déversoir.

UN TUBE DE 75 SUR UN PLATEAU

Lors d'une de nos explorations, nous avions remarqué que quelq'un avait déposé un des tubes de 75 de la tourelle, et que celui-ci reposait à côté de la tourelle. C'était visiblement un démontage clandestin avorté et nous décidâmes de prendre la suite des opérations puique la moitié du travail été déjà fait. Je pris donc contact avec les dirigeants de la centrale, notamment avec le responsable des infrastructures. Après plusieurs contacts téléphoniques et l'envoi d'une documentation prouvant notre bonne foi, je reçus de ce responsable la quasi-certitude de pouvoir procéder à l'enlèvement de ce tube. Il m'encouragea à formuler une demande écrite, ce que nous fîmes le 7 septembre 1984.

ECHEC, MAIS PAS POUR TOUT LE MONDE

Hélas, la hiérarchie d'EDF repoussa cette demande, sous prétexte de sécurité, alors que nous avions indiqué que nous étions habitués à ce genre de manipulation et que nous assumions tous les risques. Peu après, en 1986, les aménageurs de la centrale prirent quelques dispositions pour rendre le fort inaccessible et empêcher les accidents : comblement des fossés diamant, fermeture, par un mur, de l'accès au puits de l'entrée des munitions, aménagement d'une petite trappe de visite dans la façade de l'entrée des hommes après bétonnage de tous les orifices, soudure des volets d'embrasure du bloc d'artillerie.

Juste avant ces travaux, l'équipe du Simserhof démonta trois des quatre groupes électrogènes, dont un sera exposé dans cet ouvrage, les deux autre échouant lamentablement au Schiesseck.

De dépit, un des nombreux explorateurs de cette époque alluma la réserve de gazoil de l'usine, qui brûla et noircit tout le secteur. Quant au tube de 75, il fut quand même récupéré et exposé par une association thionvilloise, qui avait fait jouer ses relations et avait obtenu ce qu'on nous avait refusé.

EN BATEAU DANS LA LIGNE MAGINOT

Effectivement, l'inondation se produisit, et l'ouvrage verra ses arrières submergés. Mais le Kobenbusch n'était pas aussi hermétique que l'on pouvait le penser. Une embrasure de cloche de mortier de 50 mm avait été agrandie par une découpe au chalumeau, et des courageux étaient allé jusqu'à faire de la navigation et de la plongée dans cet ouvrage.

Qui aurait pensé qu'on naviguerait un jour dans un ouvrage de la ligne Maginot ? Curieux et inhabituel destin, que celui du Kobenbusch.

Jean-Louis Burtscher - décembre 2000



Le tube de 75mm


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