Discours du 17 juin 1940
"A l'appel de Monsieur le Président de la République, j'assume à partir d'aujourd'hui la direction du gouvernement de la France. Sûr de l'affection de notre admirable armée qui lutte, avec un héroïsme digne de ses longues traditions militaires, contre un ennemi supérieur en nombre et en armes.
Sûr que par sa magnifique résistance, elle a rempli nos devoirs vis-à-vis de nos alliés. Sûr de l'appui des Anciens Combattants que j'ai eu la fierté de commander, sûr de la confiance du peuple tout entier, je fais à la France le don de ma personne pour atténuer son malheur.
En ces heures douloureuses, je pense aux malheureux réfugiés qui, dans un dénuement extrême, sillonnent nos routes. Je leur exprime ma compassion et ma sollicitude.
C'est le coeur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut tenter de cesser le combat. Je me suis adressé cette nuit à l'adversaire pour lui demander s'il est prêt a rechercher avec nous, entre soldats, après la lutte et dans l'Honneur, les moyens de mettre un terme aux hostilités.
Que tous les
Français se groupent autour du Gouvernement que je préside pendant ces
dures épreuves et fassent taire leur angoisse pour n'écouter que leur
foi dans le destin de la Patrie."
Discours du 20 juin 1940
"Français! J'ai demandé à nos
adversaires de mettre fin aux hostilités. Le gouvernement a
désigné mercredi les plénipotentiaires chargé de recueillir
leurs conditions.
J'ai pris cette décision, dure au coeur d'un soldat, parce que
la situation militaire l'imposait. Nous espérions résister sur
la ligne de la Somme et de l'Aisne. Le général Weygand avait
regroupé nos forces. Son seul nom présageait la victoire.
Pourtant la ligne a cédé et la pression ennemie a contraint nos forces à la retraite.
Dès le 13 juin, la demande d'armistice était inévitable. Cet
échec vous a surpris. Vous souvenant de 1914 et de 1918, vous en
cherchez les raisons. Je vais vous les dire.
Le 1er mai 1917, nous avions encore 3
280 000 hommes aux armées, malgré trois ans de combats
meurtriers. A la veille de la bataille actuelle, nous en avions
500 000 de moins. En mai 1918, nous avions 85 divisions
britanniques: en mai 1940, il n'y en avait que 10. En 1918, nous
avions avec nous les 58 divisions italiennes et les 42 divisions
américaines.
L'infériorité de notre matériel a été plus grande encore que
celles de nos effectifs. L'aviation française a livré à un
contre six ses combats. Moins forts qu'il y a vingt-deux ans,
nous avions aussi moins d'amis. Trop peu d'enfants, trop peu
d'armes, trop peu d'alliés : voilà notre défaite.
Le Peuple français ne conteste pas ses échecs. Tous les peuples
ont connu tour à tour des succès et des revers. C'est par la
manière dont ils réagissent qu'ils se montrent faibles ou
grands.
Nous tirerons la leçon des batailles
perdues. Depuis la victoire, l'esprit de jouissance l'a emporté
sur l'esprit de sacrifice. On a revendiqué plus qu'on a servi.
On a voulu épargner l'effort: on rencontre aujourd'hui le
malheur. J'ai été avec vous dans les jours glorieux. Chef du
gouvernement, je suis et resterai avec vous dans les jours
sombres. Soyez à mes côtés. Le combat reste le même. Il
s'agit de la France, de son sol, de ses fils."
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Philippe Pétain (1856-1951)