L'assaut contre la casemate Oberroedern Nord



5 - Casemate de Aschbach Ouest
6 - Casemate de Aschbach Est
7 - Casemate Oberroedern Nord
8 - Casemate Oberroedern Sud

20 juin 1940

L'ennemi entreprend dès le début de la matinée un tir systématique sur les casemates d'Aschbach et d'Oberroerdern.

Vers 14 heures, l'action de l'artillerie ennemie qui s'accentue sur tout le quartier d'Oberroerdern prend les apparences d'une préparation d'attaque.

Le Schoenenbourg qui vient d'être bombardé, demande aux casematiers de lui signaler le passage d'avions afin de pouvoir éclipser à temps ses tourelles.

A 16h30 des vagues successives d'avions commencent un bombardement systématique des casemates. Les casemates de Hoffen sont les premières prises à partie, mais ce sera les casemates d'Aschbach et d' Oberroerdern Nord qui seront les plus visées. Les avions, après avoir reconnu les casemates, piquent chacun leur tour sur leur objectif et lâchent leurs bombes parfois à moins de 100 m. d'altitude.

D'une façon générale, chaque avion lâche une grosse bombe centrale et quatre petites. L'acharnement que l'ennemi apporte dans l'accomplissement de sa mission fait mal à voir. Ce n'est pas un combat mais un exercice rendu facile par l'absence totale de moyens de défense (D.C.A., avions de chasse).

Dans la casemate Oberroedern Nord le lieutenant Vialle est dans la chambre de tir Nord. Par la lunette du canon antichar de 47 mm, il observe le bombardement des casemates d'Aschbach Ouest et Est. Il tire vainement quelques coups de 47 à l'encontre des avions qui bombardent en piqué.

Enfin, c'est au tour de la casemate Oberrodern Nord d'être bombardée. A ce moment la casemate a tout ses moyens de feux intacts. Les 2/3 de l'équipage sont aux armes, 1/3 est au repos.

Les premières bombes tombent dans l'enceinte, puis la casemate encaisse une formidable secousse. La lumière s'éteint, les cloisons intermédiaires s'effondrent, les hommes crient, la poussière envahit l'atmosphère, c'est la bousculade générale. Les hommes se ruent vers l'étage inférieur et mettent leur masque à gaz.

Le lieutenant Vialle constate que le téléphone ne fonctionne plus, la casemate est coupée du monde. Il descend à son tour à l'étage inférieur et regroupe l'équipage.

Le moral de l'équipage est ébranlé par le bombardement et ses résultats sur la casemate.

Le Lieutenant Vialle rappelle à ses hommes l'exemple de nos anciens de Verdun.

Vous êtes bien Français, nos chambres de tirs sont intactes, nous avons des munitions, nous devons tenir et ils ne passeront pas. La Marseillaise s'élève. L'appel de l'équipage est fait : tous vivants, chacun rejoint son poste. Il était temps.

Pendant ce temps le soldat Augussau a remit le moteur C.L.M. en route, la lumière revient.

Le lieutenant Vialle et le soldat Gury montent dans une cloche. Ils constatent que l'ennemi, profitant du bombardement a réussi à pénétrer dans l'enceinte en venant de l'Est, le ravin de Stundwiller. Le fusil-mitrailleur de la cloche étant inutilisable, le lieutenant Vialle est obligé de changer de cloche. Par trois fois il lance une fusée de six feux vert, qui signifie "tirez sur moi".

Le caporal-chef Braleret et le soldat Augussau sont dans la cloche J.M. (Jumelage de Mitrailleuses). Ils tuent à bout portant trois soldats ennemis au pied du talus.

La chambre de tir Sud est commandée par le sergent Renard, le lieutenant Vialle lui donne l'ordre de tirer au canon antichar de 47 qui est à ce moment en batterie. Il était temps, l'ennemi était devant le créneau. Le soufle des tirs, canalisé par la visière dégage les abords. Cinq jours après l'armistice on trouvera dans le champ de tir du canon de 47, une jambe arrachée dans une botte.

Dans la cloche intacte le lieutenant Vialle met le mortier de 50 en batterie et tire dans l'enceinte, tandis que la casemate Aschbach Est du lieutenant Beck arrose à son tour avec ses jumelages de mitrailleuses la face nord de l'enceinte.

La cloche est prise à partie par une mitrailleuse allemande, le mortier est détruit. Le mortier est remplacé mais détruit à son tour. Le Lieutenant vialle commotionné évacue la cloche. Ce sont des canons de 88 mm qui sont entrés dans la danse et détruisent les créneaux des deux cloches.


Cloches GFM de la casemate Oberroedern Nord



On sent un flottement chez l'ennemi, qui commence à se replier vers le ravin de Stundwiller. Mais certains sont restés dans l'enceinte, tapis au fond des trous de bombes. Les goulottes lance-grenades sont utilisées en continu. Par un créneau de fusil-mitrailleur, le lieutenant Vialle abat un soldat ennemi avec son pistolet.

L'adjudant Limosin commande la chambre de tir Nord, dirigée vers Aschbach Est. Il tue un allemand qui attaque le blockhaus Kerneis. La casemate Aschbach Est en tue deux autres.

Vers 17h00 tout commence à rentrer dans le calme, le combat a duré environ une heure. Les derniers Allemands ont évacué l'enceinte.

Le soldat Sonntag voit subitement un soldat Allemand à cinq mètres de la porte, mais son revolver s'enraille. Dans la précipitation il donne son révolver au lieutenant Vialle, le coup part, dans le pied de l'adjudant Limosin. Le seul blessé est dû à une balle française, heureusement cela ne fut qu'une égratignure.

En fait l'Allemand du soldat Sonntag était le soldat Dupuis, qui fut le seul rescapé miraculeux du blockhaus Kerneis. Après avoir évacué le blockaus en feu, il s'était terré parmi les attaquants.


La façade arrière de la casemateOberroedern Nord


Conlusions:

La casemate Oberroedern Nord a fait l'objet d'un classique assaut d'infanterie dans un style inauguré durant la première guerre mondiale par la prise par les Allemands du fort du Camp des Romains et du fort de Vaux à Verdun.

Le principe de l'attaque est le suivant : bombardement massif de l'ouvrage pour neutraliser l'équipage en le forçant à se terrer. Pendant ce temps les troupes d'assaut font leur travail d'approche. On profite d'une accalmie pour s'élancer et coiffer les dessus de l'ouvrage avant que l'équipage ait pu se ressaisir. Dans le cas d'Oberroedern Nord il fut moins une que la manoeuvre réussisse. Tout s'est joué à une ou deux minutes près.

Les Allemands ont raté leur synchronisation, en effet au moment de l'assaut les cloches étaient encore intactes. C'est durant les combats, alors que les troupes d'assaut étaient dans l'enceinte que furent exécutés les tirs de destruction sur les cloches.



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