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Témoignage de M. Antonin PRADOUX

 

Calculateur au PC du bloc 3 de l'ouvrage de Schoenenbourg

 

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Concernant le bruit pour le bloc 3, toutes les portes étaient fermées. Le couloir principal était fermé par un sas et encastrée dans celle-ci une petite porte pour une personne, de plus elle était au  bas à 20 cm du sol et il fallait lever la jambe pour entrer. Je ne sais pas combien il y avait de pression dans l'ouvrage, mais en entrant, les tympans collaient. Les portes du PC étaient aussi fermées et de ce fait on n'entendait pas les gargousses tomber au fond du couloir '(une gargousse de 75 mm vide résonne bien)

 

Venons en à l'humidité dans le PC, ce n'était pas humide, c'était une source, l'eau qui coulait. Le bas de l'ouvrage est aussi plus froid et comme la ventilation marchait à toutes heures, il y avait condensation.

 

Je pensais trouver à ma visite le magasin à munitions étayé comme il l'était en 1940 suite à un coup de 420.

 

Dans le PC, nous étions en chaussons. A mon départ pour Haguenau, c'est le  lieutenant Micheaud qui m'a donné une paire de chaussures, ne trouvant plus les miennes.

 

Comme je vous l'ai déjà dit, nous avions un poste de TSF et pour nous distraire, nous demandions soit à des organismes, soit à des personnalités de nous adresser des dons. J'ai encore un jeu de poker offert par la Compagnie Générale Transatlantique French Line. Nous avons reçu des revues, des livres, je me souviens aussi que nous avons écrit à la chanteuse Rina Ketty que l'on entendait à la radio (j'attendrai, le jour et la nuit …) nous attendions sa réponse que nous avons toujours attendue.

 

(Le texte qui suit relate des événements qui se sont probablement déroulés à Haguenau, au sein de la caserne du 155e RAP où, en temps de paix, ont été formés les artilleurs du SFH. M. Pradoux ne le précise pas, mais on peut le deviner facilement).

 

En ce qui concerne le Lt-colonel Rodolphe, qui n'était que capitaine à l'époque,  à une revue d'habillement en tenue de guerre … qui n'était pas dans notre paquetage, mais sous le toit de la caserne. Nous étions normalement en bleu horizon. Cette tenue se portait la veste de drap dans le pantalon et pour cacher la jonction de cette horreur nous avions une  ceinture assez large qui nous entourait les reins et qui  finissait devant en formant un beau carré.

 

Donc, dans cette revue, un maréchal des logis qui pourtant avait une veste de fantaisie (pour nous elle était en drap) mais il était un peu fort en chair, avait mis sa veste sur son pantalon et sa ceinture dessus. Il lui a été signifié de s'habiller comme les autres.  Et la revue était suspendue.  Nous avons attendu un bon moment son retour. La figure toute rouge où il a repris sa place et la revue s'est terminée. Petite histoire, ils étaient trois pour fermer son pantalon avec sa veste à l'intérieur.

 

Un autre cas que j'ai eu avec deux autres camarades toujours avec lui : nous étions de corvée pour ramasser les feuilles, un au balai, un à la pelle, un à la brossette. On avait soin, vous le pensez, de ne rien casser et étant sur le côté de la caserne, nous ne pensions pas aux pavillons qui étaient de l'autre côté, nous étions observés. Nous avons bien entendu arriver quelqu'un, c'était lui (Rodolphe). Vous ferez trois jours de salle de police. Le soir, rien n'est signale, c'était le jour où j'ai bu le plus de bière à la cantine avec mes deux camarades (il n'y avait pas de vin, pour les fêtes, on allait à la cantine du 23e RI pour en chercher). C'est ce que j'ai toujours remercié chez cet homme était qu'il veillait à la nourriture (est-ce sous les ordres de Neuhauser, qui était commandant). Quand il passait à la cuisine, ce n'était pas le cuisinier qui le servait, mais lui-même et il choisissait le morceau le moins présentable. Pour la Noël 1938, les dindes étaient trop grasses, il a fait changer le menu.

 

Le mercredi, si mes souvenirs sont bons, pour le midi, pas de vin sur la table mais la petite bouteille de bière car nous avions de la choucroute. Le dimanche midi, peu de camarades allaient à Haguenau au restaurant car nous avions entrée, viande (lapin poulet, bœuf, veau, cochon) légumes, je me souviens plus pour le dessert. Certes, le soir, c'était le "singe", alors à Haguenau, c'était steak-frites, salade, le classique.

 

Etant de la classe 1938 à la  5e batterie du 155e RAP nous avons fait du maniement d'armes, des revues d'armes, démontage, remontage, nettoyage etc … toutes ces bêtises  alors que la moitié des jeunes n'ont jamais tiré, ce qui est mon cas. En temps de guerre, vous avez un fusil, pardon, un mousqueton qui n'a jamais servi et que vous ne connaissez pas, mais en plus dans les derniers moments, nous avions un révolver. Il a fallu, pour un ancien combattant entré dans l'administration, apprendre à se servir d'un révolver en 1949.

 

(Et à nouveau au Schoenenbourg)

 

Il est vrai que celui qui était de garde du matin avait en main le balai pour nettoyer le PC et appeler les autres au jus, son fusil étant dans la chambre.

 

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Antonin PRADOUX

Le 21 novembre 1988

 




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