L'un après l'autre, les pays voisins de la Suisse sont passés sous la domination allemande. L'Autriche en mars 1938, la France, en deux étapes, en juin 1940 et en novembre 1942, l'Italie en juillet 1943. A partir de 1944 les douaniers suisses n'avaient plus que des Allemands en face d'eux.

Le 21 juillet 1940, vingt officiers supérieurs se réunissent à Lucerne et fondent la "Ligue des officiers". Ils préparent un coup d'Etat au cas où le gouvernement voudrait se soumettre aux nazis.

De même,  c'est en juillet 1940 que Guisan adopte la stratégie du Réduit alpin. Après l'effondrement rapide de la Pologne et surtout de la France, le général Guisan se rend en effet compte que la Suisse ne peut pas résister à l'armée allemande en rase campagne.

L'armée suisse est donc chargée de construire dans les Alpes un noyau fortifié, le Réduit national. Celui-ci englobera les forteresses de Saint-Maurice, du Gothard et de Sargans. Le principe de Réduit national devient le nouveau principe fondamental de la défense du pays; il est approuvé dès juillet 1940 par le Conseil Fédéral.

Le 25 juillet, Guisan convoque les officiers supérieurs au Grütli, lieu symbolique de la fondation du pays et y expose sa nouvelle stratégie.

En cas d'invasion, la plus grande partie des troupes suisses se replieraient dans les montagnes où elles pourraient mieux résister, laissant les villes et le Plateau à l'envahisseur. Le but de son nouveau plan est donc d'augmenter le pouvoir dissuasif du pays en protégeant les objectifs stratégiques les plus importants pour l'Allemagne, c'est-à-dire les principaux axes de communication à travers les Alpes.

Il s'agit de démontrer à l'Allemagne (car c'est elle qui est visée) que cette invasion serait une entreprise longue et coûteuse. Les ponts et les tunnels alpins sont minés, le Réduit est fortifié à outrance.

Pour les Allemands, envahir la Suisse, c'est ouvrir un troisième front. C'est aussi risquer de ne plus pouvoir faire passer de trains par le Gothard et de se couper pendant plusieurs années la route la plus directe avec l'Italie, son principal allié.

La politique du Réduit national est donc une politique opportuniste, de circonstance. Elle n'était valable que tant que l'Allemagne était en guerre et ne voulait pas (pouvait pas) ouvrir un troisième front.

L'Allemagne avait tout à gagner de la neutralité suisse. L'Allemagne et l'Italie étaient les principaux destinataires des exportations suisses.

On estime actuellement que 60% de l'industrie d'armement, 50% de l'industrie d'optique et 40% de l'industrie des machines travaillaient pour l'effort de guerre allemand. Il s'agissait de matériels de pointe que les Allemands ne pouvaient difficilement trouver ailleurs.

Les transactions bancaires avec l'Allemagne ont joué un rôle équivalent à celui de l'industrie suisse. La Suisse était donc un vaste territoire utile à l'Allemagne tout en étant à l'abri des bombardements stratégiques des alliés anglo-américains.

Il en aurait été autrement si l'Allemagne avait été victorieuse sur tous les fronts. La Suisse encerclée de toutes parts, la politique du Réduit suisse aurait été une politique en cul-de-sac.


Le nouveau dispositif suisse :

Suite à la politique du Réduit national les trois échelons de résistance étaient :

1) les troupes de frontière, qui ont conservé leur ancien dispositif,

2) une position avancée ou de couverture, qui a utilisé l'ancien tracé de la position d'armée entre le lac de Zurich et le massif de Gempen et qui se prolongea sur un front ouest, jalonné par le Jura bernois et neuchâtelois - Morat - la Sarine jusqu'à la trouée de Bulle,

3) une position des Alpes ou Réduit national qui est flanqué à l'est, à l'ouest et au sud, par les forteresses de Sargans, de St-Maurice et du Gothard.

On remarquera que le nouveau dispositif de défense aurait eu  pour conséquence inévitable le maintien sur place de la population civile et donc son abandon à l'ennemi.




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